vendredi 15 mai 2009

Pierre Pelot, deux centième roman?

Quand j'étais gamin, mon père avait l'habitude de prendre le volant dès qu'une foire ou un salon se déroulait à portée de voiture. J'ai toujours eu la quasi certitude que le thème lui importait peu. Mais qu'il avait l'impression que les choses se passaient là, et qu'il devait y être sous peine de manquer un de ces exaltants épisodes que la société de consommation lui proposait. Je ne sais pas trop ce qu'en pensaient mes frères quand ils ont eu l'âge d'être embarqués eux aussi dans ces aventures merveilleuses - nous n'en parlions pas trop, il n'était pas question de proposer une autre activité qui, de toute manière, n'eût pas été à la hauteur des ambitions paternelles.
En tout cas, j'avais horreur de ça. Il m'arrive encore de penser aux litres de lait parfumé ingurgités gratuitement, aux soupes instantanées offertes sur certains stands, aux cuisines équipées froides et efficaces. C'était dans les années soixante. Je m'emmerdais ferme.
Sauf à la Foire du Livre de Bruxelles, où je revivais, où je me chargeais de catalogues qui ne me serviraient à rien mais me laissaient entrevoir l'immensité d'une production de livres capable de tarir, peut-être, l'immense soif qui était la mienne. Quand j'aurais l'argent pour les acheter, plus tard...
Il y avait, heureusement, des livres à la maison, une bibliothèque au village et à l'école. Et je lisais donc. Des auteurs morts, surtout. Quelques-uns pourtant vivaient encore, certains même n'étaient pas vieux du tout. Et c'est ainsi qu'un jour, dans les allées du Centre Rogier, où se tenait la Foire Internationale du Livre (il y avait un stand russe très fourni, et puis les Français étaient là, bien sûr), je suis tombé en arrêt devant Pierre Pelot. J'avais tout lu de lui, du moins je le croyais. Il avait publié en Marabout Junior, créé Dylan Stark en Pocket Marabout (la collection qui allait servir de linceul à Marabout Junior).
Et il existait vraiment, puisque je l'avais en face de moi!
Depuis, j'ai appris que je ne lirais jamais tous les livres, ni même tous ceux de Pierre Pelot. Il a dû en publier deux cents, sous son nom de plume principal ou sous d'autres noms. Je n'ai pas fait le compte. Lui-même, l'a-t-il fait? Ça m'étonnerait.
Il est en tout cas devenu, peu à peu, en privilégiant la qualité sur la quantité, un romancier qui ne se contentait plus d'être populaire. Et, même si je ne me souviens pas lui avoir parlé la première fois que je l'ai vu, les rencontres se sont multipliées ensuite. Une image: je le croise au Salon du Livre de Paris, il erre comme une âme en peine, il me confie qu'il en a marre de Paris, où il a dû arriver la veille, et qu'il a hâte de retrouver ses Vosges où il retourne le lendemain.

C'est ce même Pierre Pelot qui publie Les promeneuses sur le bord du chemin, un roman bref - il en a écrit d'énormes.
Blair est détective. Une sorte de détective, mû par de vieilles rancœurs, aigri par la vie. Il se retrouve avec un drôle de client, et d'ailleurs, est-ce un client? Adrien Norte est une notoriété du monde culturel. Il vend beaucoup de livres, on le voit à la télévision, dans les magazines. Blair ne l'aime pas. Mais, bon, il y a les lettres menaçantes que reçoit Norte, celles qui désignent l'écrivain dans d'autres lettres reçues par Blair. Il y a une affaire à débrouiller... Au travail, donc.
Sinon que le scénario imaginé par Pierre Pelot est du genre tordu, comme une route inconnue qui se referme sur elle-même - et on se demande où on est.
L'intrigue avance dans des conversations parfois décousues, et en réalité cousues avec soin. Epoustouflant!

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