mercredi 4 décembre 2013

4 décembre 1913 : Proust n'a pas le Goncourt

Claude Francueil publie en première page de Gil Blas un long reportage sur « Un scrutin épique » au terme duquel, après onze tours, Marc Elder a reçu le Prix Goncourt pour Le Peuple de la mer. Avant de voter, il fallait manger – on fait les choses dans l’ordre inverse aujourd’hui. Autre différence : après les délibérations, les votes de chaque tour étaient révélés aux journalistes.
Ce jour-là, rien ne semblait devoir se décider. Léon Werth (La maison blanche) ralliait cependant de plus en plus de suffrages : trois voix au troisième tour, quatre au quatrième, puis il en reste là et Alain-Fournier (Le grand Meaulnes) fait son apparition avec trois voix au cinquième tour et quatre au sixième. Le Prix Goncourt ne peut se jouer qu’entre les deux.
Septième, huitième, neuvième, dixième tours, le jury ne parvient pas à dégager une majorité et Lucien Descaves propose Marc Elder – gravement malade, est-ce une qualité littéraire ? Le onzième tour lui apporte six voix, la majorité et le Prix Goncourt. Gustave Geoffroy, le président, n’a même pas eu à user de la prérogative de son poste qui lui donne deux voix si nécessaire. L’ouvrage primé est « un livre de grand mérite », mais qui n’a pas convaincu la postérité.
Quant à Marcel Proust, parce qu’il faut bien une raison à raconter tout cela, il en a été brièvement question, ainsi que le rapporte brièvement Claude Francueuil : « M. Paul Margueritte nous confie qu’au cours de la discussion, M. J.-H. Rosny aîné signala un livre de grande valeur, Du côté de chez Swann, dont l’auteur, M. Marcel Proust, n’avait pas fait acte de candidat. »
Notons aussi que le Times Literary Supplement daté du même 4 décembre publie un long article de Mary Duclaux consacré à Du côté de chez Swann. Proust a commencé sa conquête non seulement de la France mais de l'Europe cultivée...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire