lundi 26 décembre 2016

David Vann secoue ses lecteurs

Impurs, qui reparaît au format de poche dans la collection « Totem » des Editions Gallmeister,  est le troisième roman de David Vann traduit en français, après Sukkwan Island et Désolations. Et la troisième grande claque qu’il nous met dans la figure, selon une méthode désormais bien éprouvée : il endort son lecteur dans la première moitié du récit, installant un cadre plaisant sous lequel percent déjà les germes de ce qui va suivre ; puis il détruit ce qu’il a construit avec une rage impatiente et conduit vers un abîme fascinant. On note cependant, dans Impurs, une mise en place plus visible des éléments de la catastrophe. Mais la claque est aussi violente.
Galen est un jeune homme de vingt-deux ans. Il vit avec sa mère, au rythme des saisons, dans une exploitation agricole dont les noix sont la principale récolte. Ses contacts avec l’extérieur se résument aux visites qu’ils rendent à sa grand-mère, placée dans une maison de repos et pourvoyeuse malgré elle des principaux revenus de la famille. Ainsi qu’au passage régulier, chez eux, de la tante Helen avec sa fille Jennifer, dix-sept ans. Mais le monde extérieur ennuie Galen. Il n’y voit, malgré l’affection qu’il porte à sa grand-mère, que futilités contre lesquelles il s’élève de manière puérile, lâchant à intervalles réguliers les mots dont il connaît l’effet urticant sur sa mère. Il cherche sa voie personnelle dans la communion avec la nature, selon une vague philosophie new age construite sur des lectures sauvages. Et compte ainsi atteindre la sérénité.
Cette sérénité devient cependant de plus en plus inaccessible, tant elle est contrariée par les érections persistantes provoquées par la présence de sa cousine, qui joue avec talent et perversité de son jeune pouvoir de séduction. Galen est vaincu par le désir, et le désir provoque une réaction en chaîne aux conséquences imprévisibles. La folie douce qui l’habitait se transforme en pulsions mortelles, dans des pages hallucinées et hallucinantes dont on sort la tête à l’envers, avec le besoin de laisser passer du temps pour la remettre à l’endroit.
On sera bousculé autrement, dans une construction du récit plus complexe, par le dernier roman traduit de David Vann, Aquarium, paru chez le même éditeur. L’écrivain s’y renouvelle avec bonheur sans rien perdre des inquiétudes qu’il nous transmet.

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